Pourquoi la Russie devra restituer l’ensemble de ses conquêtes en Ukraine
L’ « opération spéciale » russe contre l’Ukraine, est d’autant plus illégale que l’Ukraine,
indépendante depuis 1991, a fait l’objet d’une reconnaissance internationale par l’ONU et par la Russie elle-même. La Russie a signé le Mémorandum de Budapest (1994) garantissant les frontières de l’Ukraine en échange de son désarmement nucléaire.
En envahissant l’Ukraine, la Russie ne viole pas seulement la souveraineté d’un pays : elle détruit le socle même du droit international moderne. La Russie réhabilite la logique impériale des conquêtes par la force, et justifie rétroactivement toutes les annexions illégales depuis
1945. C’est un retour à la loi de la jungle, que l’ONU avait précisément été créée pour bannir.
En effet le droit international protège les peuples, mais pas au prix de la guerre sans fin. Si revendiquer sa culture et son autonomie est légitime, revendiquer un État par les armes est illégal. Seule la voie pacifique et négociée donne une indépendance reconnue.
Depuis 1945, le droit international reposesur un principe cardinal : l’intangibilité des frontières et l’interdiction de l’acquisition de territoires par la guerre (Charte de l’ONU, art. 2§4). Les frontières ne sont pas « figées pour l’éternité », mais elles nepeuvent être modifiées que par consentement mutuel et pacifique(négociation, référendum reconnu, traité).
Toute modification par la force est illégale. La réunification de l’Allemagne (1990) ou le divorce pacifique Tchéquie/Slovaquie (1993) sont légitimes, car négociés et reconnus.
En effet la Charte de l’ONU prévoit que chaque État reconnu est souverain, quel que soit son passé, sa taille ou sa puissance (Article2 §1 : « L’Organisation est fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres. »)
De plus elle prévoit le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (l’article 1 § de la Charte, renforcé par les résolutions 1514 (1960, Déclaration sur la décolonisation) et 2625 (1970, Déclaration sur les relations amicales).
En droit international, la souveraineté ne découle pas d’anciennes conquêtes, mais de la volonté des peuples et de la reconnaissance actuelle par la communauté internationale. Ce qui fonde l’État, ce n’est pas la possession antérieure fusse-t-elle d’un passé impérial, mais le présent de ses citoyens et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Le droit international se base sur le Principe d’uti possidetis juris (affirmé lors de la décolonisation en Afrique et en Amérique latine) : à savoir que les frontières héritées (même artificielles) deviennent celles des nouveaux États indépendants. L’objectif étant d’éviter des guerres sans fin liées aux cartes “injustes” héritées d’empires ou de dictateurs.
Le droit international ne “corrige pas toutes les injustices” mais il trace une règle claire : aucune guerre d’agression ne peut créer un droit nouveau.
D’où il découle selon le principe d’intégrité territoriale qu’aucun État ne peut s’emparer par la force du territoire d’un autre (article 2 §4 de la Charte de l’ONU). Même si un territoire a appartenu à un empire, cela ne crée aucun “droit au retour”pour l’État héritier. Revendiquer des droits russes sur l’Ukraine c’est comme si la France revendiquait des droits sur l’Algérie au nom de la colonisation
passée.
Une exception reste possible, celle du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le droit international reconnaît que les peuples peuvent revendiquer l’autodétermination (art. 1 de la Charte de
l’ONU). Mais l’ONU l’applique surtout aux situations de colonisation ou d’oppression grave (apartheid, génocide). Dans les faits ce droit entre souvent en conflit avec le principe d’intégrité territoriale et c’est presque toujours ce dernier qui l’emporte pour préserver la stabilité internationale.
Le droit international n’est pas fait pour corriger toutes les injustices du passé, mais pour empêcher de nouvelles guerres. Les frontières arbitraires héritées de l’histoire deviennent intangibles, sauf accord pacifique entre les parties.
Revendiquer un État par la force est illégal. La seule légitimité internationale vient de :
· un accord pacifique avecl’État central (ex. indépendance du Soudan du Sud en 2011 après référendum reconnu),
· ou une oppression extrême reconnue par l’ONU pouvant justifier une sécession “remède” (remedial secession).
Si la communauté internationale accepte le fait accompli de l’invasion ukrainienne elle ne peut plus
logiquement s’opposer à l’indépendance par exemple des kurdes d’Irak proclamée par référendum en 2017, qui a été rejetée par l’ONU, les USA et l’UE car elle violait l’intégrité territoriale irakienne). Nià l’indépendance des Berbères (Kabyles, Rifains, Touaregs, etc.), peuple autochtone d’Afrique duNord réparti entre le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye, le Mali, le Niger.
Pire, elle légitime les invasions/annexions illégales depuis1945, à savoir (pour l’essentielle) :
Années 1940–1970
URSS : annexion des Pays baltes (1940, non reconnue par l’ONU
Chine : invasion du Tibet (1950), annexion illégale, jamais reconnue par beaucoup d’États.
Indonésie : annexion du Timor oriental (1975 ) condamnée par l’ONU, réversée en 2002 avec l’indépendance.
Turquie : invasion du nord de Chypre(1974). République turque de Chypre du Nord reconnue seulement par Ankara.
Maroc : “Marche verte” et occupation du Sahara occidental (1975) toujours contestée
Années 1980–1990
Irak : invasion et annexion du Koweït (1990) condamnée par l’ONU, réversée par la guerre du Golfe.
Arménie/forceslocales : occupation du Haut-Karabakh et de districts azéris (1993), condamnée par plusieurs résolutions de l’ONU, réversée partiellement en 2020 et 2023.
Années 2000–2020
Russie : Reconnaissance unilatérale de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud après la guerre deGéorgie (2008).
Annexion de la Crimée (2014), condamnée par l’ONU (rés. 68/262).
Invasion du Donbasspuis guerre totale (2022), condamnée massivement par l’ONU.
Israël : annexion de Jérusalem-Est (1967) et du Golan syrien (1981), jamais reconnues par l’ONU.
Éthiopie/Érythrée : guerres frontalières (1998-2000), mais règlement par traité (2000, 2018).
Conclusion :
Depuis 1945, toute conquête territoriale par la guerre est illégale. L’ONU a choisi la stabilité
contre la loi de la jungle. Voilà pourquoi toutes ces conquêtes ne pas sont reconnues.
toutes ces annexions par la force sont jusqu'à présent illégales en droit international. Certaines sont devenues des “faits accomplis” tolérés (Tibet, Jérusalem-Est, Crimée), mais aucune n’a obtenu de reconnaissance internationale majoritaire. Avec l'agression russe de l'Ukraine leur acceptation s'en trouve renfocée..